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		       INSTITUT LEININGER    
		
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- Un bon mental, une bonne philosophie de vie, un corps souple et fort pour mieux vivre sa vie -
                               
    
Sommes-nous des yogis-guerriers ? 
                                     
Articles parus dans la revue Drish : n°111, 112-113, 115, 119, 121, 122-123, 
126.
                                     
suivi de "Un délinquant qui ne s'est jamais fait prendre" (Drish 115).
                       
Ce thème a été traité dans mes articles parud 
dans la revue spécialisée Drish. Il s'agit d'un vaste sujet traité dans les 
numéros 111 à 126.
Il pose la question 
fondamentale du devoir du Yogacharya, du pratiquant de Yoga dans le monde 
moderne. 
C'est aussi un besoin fondamental, tant il importe pour chacune et 
chacun de nous, de réaliser ce qu'il est et ce qu'il doit accomplir en ce monde 
...
| 
		...
Je crois pouvoir affirmer que ce que chaque être humain recherche, au-delà de la 
satisfaction de ses besoins premiers, est, sinon le bonheur, en tout cas d’être 
heureux. Ceci n’est accessible que si l’on a la possibilité de vivre une vie 
paisible … Comme le dit très justement la Bhagavad Gîtâ II, 66 à propos de la 
méditation (Cf page 4) :  | 
		Voir aussi :  
 | 
Sommes-nous des yogis-guerriers ? 
-  Drish 111
Qu’est devenue Jeanne Liberman ? Célèbre à la fin des années 70 pour son livre
La vieillesse ça n’existe pas, elle 
reste un exemple de gentillesse et de force, d’abnégation et d’esprit de 
décision, de souplesse et d’énergie.
Mais quel rapport avec le sujet précis du Yoga et 
d’être (ou pas) un guerrier ? 
De gentils guerriers
Comme j’ai pu l’indiquer (Drish
107-108), la gentillesse ne doit pas être 
assimilée à un quelconque laisser-faire, à de l’indifférence 
ou à une niaiserie béate comme le croient ceux qui voient dans cette attitude 
une marque de faiblesse dont on peut abuser facilement ou ceux qui se 
considèrent comme des battants, ou, pour utiliser une détestable 
terminologie moderne, des winners, 
voire des killers sans conscience ni 
réflexion. Les soubresauts de l’histoire tant individuelle que des peuples, 
montrent combien les événements ont parfois tendance très vite à faire oublier 
et effacer des valeurs humaines idéales plus rapidement qu’ils ne les mettent en 
place, et à en venir à s’imposer avec des intentions non dites. 
                 
 
  
 
 

1/ Jeanne Liberman, force et 
souplesse …
2/ Arjuna et le doute …
3/ non représenté ici : Un vrai travail de fond …
4/ Une civilisation très avancée …
Le guerrier montre ici le bout de son nez car, qu’on pratique le Yoga 
ou non, le choix qui se pose dans ce cas ou bien lorsqu’on est confronté à ces 
situations difficiles pour soi comme pour les autres, est soit de ne rien faire 
et de rester consciemment ou non, enfermé dans les mécanismes d’obéissance, de 
soumission, de lâcheté, soit d’agir en restant fidèle aux principes du Yoga 
traditionnel.
Des valeurs nobles
Là est le guerrier qui n’est pas un tueur, justement, mais celui qui décide 
et œuvre en fonction de sa réflexion et de ses principes tout en agissant 
totalement selon des valeurs qu’il a librement choisies. 
Car si la gentillesse dont j’ai longuement parlé est le résultat d’une vraie 
force intérieure qui réclame un réel travail sur soi quotidien pour y parvenir 
du fait que chaque nouvelle situation vient défier nos potentialités, nous 
devons veiller et ne pouvons tout laisser faire. Ce travail sur soi est un 
combat de chaque instant, un combat pacifique (ça existe ?!) et le choix de ne 
pas sombrer dans le défaitisme. C’est une décision de comportement qui s’exprime 
dans chaque pensée, chaque acte, chaque parole, chaque regard et qui est le 
fruit de la prise de conscience de la nécessité de modifier profondément son 
existence.
Mais alors ? Les valeurs idéales en question ?
Elles se maintiennent, se confortent, s’accomplissent au prix d’une vigilance de 
chaque jour et d’une prise de position permanente. Ce n’est pas de tout repos, 
mais c’est le prix de la paix, tant avec les autres qu’avec soi-même. 
Nous ne pouvons pas ne pas agir
Nous devons nous souvenir que nous ne pouvons pas ne pas agir et que ne pas 
agir est la complicité passive qu’attendent ceux qui comptent bien qu’on se 
lasse à défendre des valeurs que certains jugent comme caduques, vieillottes, 
ringardes.
La paix nommée plus haut est en lien à 
Ahimsa,
ne pas tuer 
la première valeur 
enseignée par le Yoga traditionnel (de 
himsa = tuer, et a, privatif)
qui va guider le guerrier que chacun de nous est. 
Gandhi l’a traduit par non-violence. 
Un des sens de Ahimsa est : ne pas nuire, ce qui, concrètement 
consiste à ne pas nuire à autrui et ne pas se nuire. Ahimsa est une des 
composantes de 
la triple ascèse 
enseignée par la Bhagavad Gîtâ (ascèse du corps, de la parole, du 
mental). 
Au-delà du choix en négatif de ne pas nuire, est celui 
de la gentillesse déjà évoquée ci-dessus, car c’est un choix réel et non imposé 
par l’entourage, une preuve de grande force intérieure en ce qu’elle résulte 
d’une mise en pratique concrète de principes et de valeurs. Ce choix est en 
accord avec 
Ishvarapranidhana, 
le don de soi qui est une dimension du Yoga. Le guerrier que nous sommes est là 
pour servir, c’est un combat noble : à noter que dans 
la tradition japonaise, le mot samouraï est 
dérivé du verbe saburau qui veut dire ‘servir’.
     Illustration : 
Une voie d’autonomie …
La non-violence : un choix décidé
Est-ce là le choix de ces peuples des 
cités très avancées de la vallée de l’Indus, lorsque les envahisseurs 
indo-européens arrivèrent avec leurs armes et leurs chars ? Ces populations 
autochtones d’un très haut niveau de civilisation, autant que l’Egypte et la 
Mésopotamie, ont été décimées en opposant, apparemment, peu de résistance aux 
envahisseurs ? Ce peuple très évolué qui semblait ignorer toute coercition 
politique ou religieuse, ne s’était semble-t-il, jamais préparé à la guerre et 
avait déjà fait le choix de la non-violence … 
Ceci dit, où en sommes-nous dans cette étrange association de Yoga, gentillesse, 
paix, guerrier, ne pas nuire, don de soi … ? …
Dans le numéro 106, je précisais le courant visant à la liberté et l’autonomie 
qu’est le Yoga dans lequel on note l’absence de croyance dogmatique imposée. Personne 
ne peut dicter son comportement à celui qui, libre de ses choix, suit assidûment 
cette voie. Souvenons-nous de la phrase présente en page 3 de la revue et qui y 
apparaît de façon systématique : le yogi sait que c’est sa loi d’action (swadharma) 
qui compte et non celle dictée par quiconque.
L’humanisme en tant 
qu’il reconnaît 
l'être humain 
comme valeur suprême et 
met au premier plan des préoccupations le développement de ses qualités 
essentielles, 
est présent dans le Yoga puisque le but du Yoga est de libérer l’humain de sa 
condition. Cela commence ici et maintenant et ne saurait faire renoncer à
défendre la personne humaine dans ses droits et à travailler à son développement 
moral, intellectuel, spirituel, matériel. 
Ce qui signifie que pratiquer le Yoga qui intègre ces valeurs dont on peut dire 
qu’elles sont universelles, ne met pas à l’abri d’actions réfléchies et 
engagées. Dans le numéro 109, je précisais que le fait que nous soyons des 
guerriers et des travailleurs en plus d’être pourvus d’une dimension spirituelle 
qui anime chacun de nous, n’enlève rien à la vertu de la gentillesse qu’il est 
nécessaire de pratiquer au quotidien et le plus possible.
Mais il faut aussi veiller car notre devoir d’humains est de combattre 
pacifiquement les excès inacceptables et faire de la résistance, certes 
courtoise, mais résistance tout de même et nous opposer à ce qui nous semble 
aller contre la nature humaine et ses intérêts fondamentaux.
Peut-être Alain encourageait-il à cette attitude de refus lorsqu’il disait : 
Penser c’est dire non !
                                                                                                                                              … à suivre … 
Sommes-nous des Yogis-guerriers ?
  
-  Drish 112-113
 La 
discipline quelle qu’elle soit, fait de celui qui la suit, un guerrier en ce 
sens qu’il va déployer ses moyens humains dans une lutte, un combat dans lequel 
il tentera de devenir maître de lui-même, ou en tout cas de ne plus être le 
jouet d’impulsions ou d’un fatum qu’il pensait jusque-là, inévitable.
La 
discipline quelle qu’elle soit, fait de celui qui la suit, un guerrier en ce 
sens qu’il va déployer ses moyens humains dans une lutte, un combat dans lequel 
il tentera de devenir maître de lui-même, ou en tout cas de ne plus être le 
jouet d’impulsions ou d’un fatum qu’il pensait jusque-là, inévitable.
Ne pas agir est tout de même agir en laissant faire les choses, ce qui n’est pas 
toujours souhaitable. Les taoïstes ont une expression qui est très proche de 
concepts hindous liés au Tantra en particulier, le Wei Wou Wei qui 
désigne l’agir dans le non-agir.
Nous ne pouvons pas ne pas agir, et le fait que certains textes du Yoga ancien 
invitent le yogi à se retirer du monde, cette consigne n’est valable que pour 
les temps anciens et que pour les yogis ayant décidé de vivre cette voie de 
libération de la condition humaine, de la façon la plus complète et même la plus 
extrême puisqu’elle passe par un renoncement total.
Nous n’en sommes pas là, heureusement, et j’ai pu décrire par ailleurs les 
risques liés à la tentation de plaquer ce modèle typiquement oriental à notre 
mode d’existence occidental.
Petite histoire d’un sage de l’Inde
Ramakrishna, sage indien du XIXème siècle racontait la délicieuse histoire du 
sage et du serpent. Il y avait un chemin sur lequel se trouvait un serpent 
venimeux. Un sage passa : des enfants s’approchèrent de lui pour l'avertir du 
danger qu’il courait. Le sage les remercia et déclara ne pas avoir de crainte 
quant à cette rencontre. Il possédait des pouvoirs liés à son état qui le 
protégeraient contre toute attaque du reptile. Puis il continua son chemin.
     Illustration : 
Jeanne Liberman, force et souplesse
Un peu plus loin, tout d’un coup, le cobra se dressa devant lui. Au fur et à 
mesure qu’il s’approchait du saint homme il se sentit soudain rempli d’une sorte 
de douceur. Le sage, voyant le serpent, prononça une formule magique et le 
serpent s'apaisa à ses pieds. Le sage lui demanda ensuite s’il avait l’intention 
de le mordre et pourquoi il se comportait ainsi avec violence à mordre les gens. 
Il n’obtint pas de réponse et en même temps, lui donna une formule à répéter 
afin de s’apaiser, de ne plus être violent et de perdre tout désir de faire du 
tort à autrui. 
Après avoir reçu la fameuse formule, le serpent s’en retourna dans son antre 
pour y vivre d'innocence et de pureté, sans avoir plus jamais le désir ni la 
tendance de blesser un être vivant. Au bout de quelques jours les enfants du 
village s'aperçurent de ce changement d'attitude. Pensant que le serpent avait 
perdu son venin et son agressivité, ils se mirent à le tourmenter, à lui jeter 
des pierres et à le traîner sur les cailloux. Le serpent, grièvement blessé, ne 
riposta pas, se laissa faire et alla se cacher dans son trou.
Quelque temps plus tard, le sage repassa par ce chemin et chercha le serpent, en 
vain. Il vit les enfants et leur demanda où il pouvait bien être. Les enfants 
lui dirent qu’il était mort, mais il refusa de les croire, sachant que le 
serpent était sur le chemin de sa réalisation. 
Il se mit à l’appeler. Finalement, l’animal, très affaibli, amaigri, sans 
énergie, endommagé, sortit de son trou. Le sage lui demanda des nouvelles de sa 
santé, ce à quoi le serpent répondit que tout allait bien. Peu satisfait de 
cette réponse, au vu de son état, le sage voulut en savoir plus et lui demanda 
pourquoi il était dans un tel état. Le serpent répondit simplement que 
conformément aux instructions du sage, il cherchait à ne plus faire de mal à 
aucune créature, se nourrissant seulement de feuilles, ce qui expliquait qu’il 
ait un peu maigri. Toujours pas convaincu, le sage répliqua qu’un simple régime 
végétarien ne suffisait pas à lui seul à rendre l’animal aussi maigre et qu’il 
devait sûrement y avoir autre chose. Alors le serpent raconta qu’un jour, les 
petits bergers avaient été un peu durs avec lui. Ils l’avaient pris par la queue 
et fait tournoyer en l’air, puis frappé sur les pierres sans savoir qu’ils ne 
risquaient rien puisque le serpent ne les mordrait plus.
 Le 
sage répondit en souriant :
Le 
sage répondit en souriant : 
Mon pauvre ami, je t'ai recommandé de ne mordre personne, mais je ne t'ai pas 
défendu de siffler pour éloigner les persécuteurs et les tenir en respect.
Ramakrishna conclut cette histoire disant que, de 
même, vous qui vivez dans le monde, ne blessez personne, mais ne laissez non 
plus personne vous molester. 
L’avis de Gandhi
Si Gandhi a donné une traduction à la fois sémantique et très concrète et 
pragmatique du mot sanskrit Ahimsa en lui donnant le sens de non-violence 
et en pratiquant lui-même cette non-violence, il n’en reste pas moins qu’un de 
ses principes était :
     La violence vaut mieux que la 
lâcheté.
Certes, la violence n’est pas la solution : l’entente, la justice décidée en 
commun, sont préférables. Cependant, il faut se rendre à l’évidence que le fait 
d’être parfois confronté à des situations difficiles, d’avoir épuisé tous les 
moyens possibles ne laisse qu’un dernier choix : celui de la force ou … de la 
fuite. La nuance est de taille : vous avez bien lu force et non 
violence. Mais lorsque vous décidez d’user de la force qui n’est pas 
seulement la vôtre mais qui peut être simplement celle de la loi (Aïe ! Voilà un 
mot particulièrement peu facile à entendre. Et pourtant …), votre démarche est 
parfois considérée comme injuste, démesurée, violente. Chaque être humain 
rencontre au moins une fois au cours de son existence, hélas, ce genre de 
situation. 
La pratique du Yoga n’exclut pas le recours à la force et même à la violence. Si
Ahimsa se traduit par Non-violence ou simplement Ne pas tuer 
ou Ne pas nuire, les Lois de Manu qui sont le texte donné au premier 
homme (selon la tradition hindoue) indiquent que l’on peut tuer dans certains 
cas précis. Ceci reste l’extrême limite et on sait de nos jours la polémique 
existant autour de la question de la légitime défense. L’objet de mon écrit 
n’est pas là : il est simplement de dire que nous devons nous tenir prêts car 
parfois, la paix nécessite d’être aptes à affronter l’adversité, et cela au 
quotidien. Il n’y a rien de surprenant ici, puisque nous connaissons tous des 
situations pas toujours simples dans les relations avec les autres, pour des 
raisons diverses. 
Enfin, la fonction sociale tripartite telle qu’elle existe dans de nombreuses 
civilisations et notre propre constitution d’être vivant renvoient à cette 
nécessité de garder notre capacité guerrière en état.
Comme nous le verrons dans le prochain Drish, cette fonction guerrière n’est pas 
nécessairement à voir dans la relation à l’extérieur : chacun de nous a aussi à 
se défier de lui-même. La symbolique de l’épée propre aux chevaliers, la 
présente avec deux tranchants : il en est un pour lutter contre l’extérieur, 
l’autre pour le combat à livrer parfois contre soi-même.
                        
                                                                                                             (à suivre …)
Sommes-nous des Yogis-guerriers ?
  -  Drish n°115
Etre apte à affronter l’adversité, établir une nuance entre Force et 
Violence, adopter le concept typiquement taoïste de
Wei Wou Wei qui est l’agir dans le 
non-agir, ont sûrement éclairé le lecteur sur la vision du guerrier telle que je 
l’envisage ici. Il n’est donc plus surprenant ni inquiétant de voir associés ces 
deux mots Yogis et guerriers qui, s’ils semblent en totale opposi
 tion, 
sont en fait complémentaires pour au moins deux raisons.
tion, 
sont en fait complémentaires pour au moins deux raisons. 
La première de ces raisons est qu’il est impossible de rester inactif en ce 
monde et de vivre selon un fantasmatique retrait de la société des hommes en 
espérant trouver le salut sur cette voie d’isolement ou de fuite car l’intention 
reste à définir.
Certes, sur ce point, la Bhagavad Gîtâ enseigne que s’éloigner ou se retirer de 
la vie des hommes et du monde … en un 
lieu écarté … (Bhagavad Gîtâ, XIII, 11) est une nécessité pour accéder à la 
connaissance de Soi en … ce monde 
périssable et rempli de maux … (IX, 33). Il faut que le 
yogi … s'écarte du vain bruit des 
foules et des assemblées des hommes …  
(Bhagavad-Gîtâ, XIII, 
11-12). Dans son chapitre XVIII, elle évoque le recours … 
à l'impersonnelle solitude … (XVIII, 
51-53) et aussi … Un esprit méditatif 
tourné vers la solitude.  
    
Illustration : Le retrait du monde 
n’est pas la voie
La pratique de la Contemplation telle que décrite dans les Yoga-Sutra nécessite 
le retrait et l’une des Upanishad du Yoga enseigne que le yogi … se bâtira 
une hutte … (Yogatattva Upanishad), etc. Mais ce qui est valable pour l’Inde 
ne l’est pas nécessairement en Occident où dons, aumônes et entretien des 
‘renonçants’ s’étant retirés de l’existence classique, ne font pas partie des 
mœurs et habitudes.
 La 
seconde raison est que la Bhagavad Gîtâ qui invitait ci-dessus au retrait du 
monde, enseigne aussi que (Bhagavad Gîtâ, III, 5) …
personne, pas même un instant, n’est 
réellement inactif ; tout homme, malgré lui-même, est mis en action par les 
fonctions naturelles de son être … L’inaction nous est donc impossible et se 
couper du monde ne peut être sérieusement envisageable.
La 
seconde raison est que la Bhagavad Gîtâ qui invitait ci-dessus au retrait du 
monde, enseigne aussi que (Bhagavad Gîtâ, III, 5) …
personne, pas même un instant, n’est 
réellement inactif ; tout homme, malgré lui-même, est mis en action par les 
fonctions naturelles de son être … L’inaction nous est donc impossible et se 
couper du monde ne peut être sérieusement envisageable. 
Au risque d’aller à l’encontre de ceux qui pensent que la Méditation permet de 
se connaître, je cite Gandhi qui insistait sur la nécessité de l’action  :
     Comment peut-on apprendre à se 
connaître soi-même ? 
     Par la méditation, jamais, mais bien 
par l’action. 
Au-delà de ce constat d’impossibilité, cette sagesse indienne enseigne le 
Yoga de l’action, le Karma Yoga dans lequel seule l’action compte et non ses 
fruits qu’en général on a tendance à chercher. Cette sagesse encourage ce 
qu’elle nomme l’œuvre nécessaire 
(Bhagavad Gîtâ, III, 8). Pour elle, … 
l’œuvre vaut mieux que l’inaction ; sans agir, tu ne pourrais pas même nourrir 
ton corps … (Bhagavad Gîtâ, III, 5). 
    
Illustration : Force et douceur, agir et non-agir …
L’encouragement prend peu à peu un caractère impératif :
… Celui qui ne coopère point ici-bas à ce 
mouvement circulaire de la vie … vit inutilement … (Bhagavad Gîtâ, III, 16) 
rejoignant ce que j’ai déjà évoqué (Drish 111 page 26) : on ne peut pas ne pas 
agir.
Le Karma
S’il est un point délicat à aborder lorsqu’on s’intéresse à la culture 
orientale, c’est bien celle du Karma. Ce concept typiquement indien trop souvent 
mal compris dans son importation ou de façon incomplète, a une acception très 
proche de celle du fatum des Romains (Cf. Drish 110, page 16) qui est une sorte 
de résignation sans action, d’acceptation passive. 
    
Illustration : Debout, nous relions Ciel et Terre 
Or, l’intérêt de ce beau mot de karma est qu’il a un double sens : celui de 
conséquence de l’action qui va influencer, conditionner nos vies futures, selon 
le principe de la réincarnation, mais aussi celui d’action. Cela signifie que ce 
qui nous arrive doit être d’abord accepté en tant qu’événement de l’existence. 
Cette acceptation permet de faire le point à partir duquel pourra se bâtir un 
plan d’action juste et adapté allant dans le sens de la Vie, selon 
les principes déjà évoqués (Cf. E. Zarifian dans Drish 111 sur le métier 
d’humain qui est un métier que l’on doit faire debout). 
Le maintien des valeurs portées par le Yoga traditionnel nécessite cette 
résistance par rapport à soi-même pour aller dans le sens d’une amélioration par 
un vrai travail sur soi car dans le sujet qui nous occupe, nous devons agir 
selon l’enseignement taoïste du Chapitre 68 du Tao To King qui dit que … 
Un véritable guerrier n'est pas coléreux … et par rapport au monde 
ambiant lorsque son mouvement va à l’encontre du respect de l’humain.
    
Illustration : Résister, lutter, s’opposer … Il n’est pas 
aisé de le décider puis de  le faire
Cette résistance peut être active ou passive, mais dans tous les cas, elle 
doit se faire et être affichée et non feinte dans la mesure où cette position 
nette a valeur pédagogique. Ce n’est pas le plus facile, mais ce qui est le plus 
difficile à faire est sûrement de prendre la décision de lutter, s’opposer, 
résister : ce temps est précédé d’une inconfortable hésitation au cours de 
laquelle on doit aller chercher au plus profond de soi quelle est la meilleure 
attitude à adopter.
La question qui se pose est de savoir si l’être humain est fait pour cette 
attitude de guerrier ou bien si elle n’est qu’une disposition rare, acquise et 
non innée.
Ce pouvoir de lutter est en chacun de nous et chacun de nous a été amené au 
cours de son existence, à prendre position face à une adversité allant à 
l’encontre de ses valeurs personnelles. Ce qui explique la non-émergence de 
cette capacité d’opposition tient au fait de ne pas croire en ses moyens, en ce 
pouvoir d’action que chacun de nous détient, en l’issue possible et au 
conditionnement culturel, à l’éducation, aux expériences personnelles, à 
certains mécanismes humains tels que ceux de l’obéissance et du conformisme 
découverts par les expériences de Asch et Milgram dans les années 50, dont j’ai 
pu parler dans la série d’articles 
’Dessine-moi un mouton’ de façon 
régulière et continue des numéros 87-88 aux 102-103. Quelle que soit la 
raison du non-engagement, ce que nous devons retenir, que l’on soit yogi ou non, 
est qu’un combat auquel on renonce est forcément un combat perdu d’avance : 
c’est en filigrane l’enseignement de la Bhagavad Gîtâ citée plus haut. 
Un vieil adage d’Orient disait que c’est lorsqu’on dit d’une chose qu’elle est 
impossible qu’on la rend impossible. Un autre principe est que
Si vous courbez le dos, vous trouverez 
toujours quelqu’un pour monter dessus !
On le voit, la sagesse orientale a des aspects très pragmatiques …
Le rapport au monde, si on accepte de considérer ce rapport sous un angle 
réaliste, nous amène très vite à nous poser la question sur les limites du 
concept de Non-violence et sur la présence ou non d’une capacité guerrière en 
chacun. Cette présence est.
La fonction tripartite.
Dans sa thèse, le linguiste, philologue, académicien Georges Dumézil 
(1898-1986) qui a beaucoup travaillé sur les civilisations et religions 
indo-européennes, évoque cette fonction tripartite des sociétés humaines selon 
laquelle elles sont structurées avec un corps sacerdotal liée à la fonction 
sacrée, une classe de princes-guerriers et enfin la classe travailleuse. Cette 
constitution triple est commune à la Rome ancienne, à l’Ancien Régime en France, 
au système des castes indien, ainsi qu’à l’agencement du panthéon védique indien 
où ces trois classes existaient aussi pour les dieux. Ainsi, la mythologie 
indienne évoque Prajapati qui, seul existant eut le désir de la Création. Chaque 
étage de son corps donna naissance aux classes ci-dessus. 
Le texte sacré de la Bhagavad Gîtâ précise que tout ce qui existe est soumis au 
principe des 3 Guna-s que l’on traduit le plus souvent par qualité.
Il n’existe ni sur terre, ni au ciel 
parmi les dieux, aucune essence qui soit exempte de ces trois qualités issues de 
la nature dit le verset 40 du chapitre XVIII (trad. Emile Burnouf). Ce sont 
ces qualités, définies avec précision par le texte, qui vont donner les trois 
fonctions de la société hindoue. 
Les 3 
Guna-s ;
Sattva -
perfection
Rajas- 
mouvement, lumière
Tamas - 
inertie, obscurité
Ainsi, … la paix, la continence, 
l’austérité, la pureté, la patience, la droiture, la science avec ses 
distinctions, la connaissance des choses divines : telle est la fonction du 
Brâhmane, née de sa propre nature … (Bhagavad Gîtâ XVIII, 42). 
La deuxième classe, celle guerrière (Kshatriya), se caractérise 
par (Bhagavad Gîtâ XVIII, 43) : 
L’héroïsme, la vigueur, la fermeté, l’adresse, l’intrépidité au combat, la 
libéralité, la dignité d’un chef … La troisième caste est définie au verset 
44 du même chapitre : … L’agriculture, le 
soin des troupeaux, le négoce … 
C’est trois versets plus loin que se trouve la phrase que vous connaissez bien 
puisqu’elle est présente dans la revue depuis longtemps et de façon régulière :
     
Mieux vaut pour chacun sa propre loi d’action, même imparfaite, que la loi 
d’autrui, même bien appliquée. 
     On n’encourt pas de risque quand on 
agit selon sa propre nature 
(Bhagavad Gîtâ XVIII, 47) 
Si cette disposition génère dans son mode rigide, de nombreuses injustices, 
il n’en reste pas moins qu’il n’est que le reflet de ce que nous sommes, avec 
plus de souplesse, celle-là même dont Lao-Tseu disait qu’elle est …
proche de la vie … alors que …
ce qui est rigide est proche de la mort.
Il y a en chacun de nous, en plus du travailleur, la dimension spirituelle, 
que l’on soit athée ou non, et enfin, celle guerrière. Certes, la civilisation a 
largement émoussé cette dernière fonction, mais elle est seulement endormie, 
voire, dans le pire des cas, refoulée, le plus souvent, méconnue, ce qui 
explique le nombre de faits divers dont la presse nous livre chaque jour, le 
récit détaillé, que ce soit entre individus, entre communautés, entre nations. 
La psychologie moderne désigne sous l’appellation retour du refoulé une 
notion héritée de la psychanalyse permettant de mieux comprendre ce qui se 
passe.
Ce terme, inventé par Sigmund Freud au début de l’invention de la psychanalyse, 
désigne le 
retour et l’apparition de contenus psychiques en 
dehors de l'inconscient, alors qu’ils avaient été refoulés parce que inavouables 
et inconciliables entre les exigences du ça et son activité inconsciente d’une 
part et des impératifs moraux du Surmoi d’autre part. Les manifestations du 
rêve, des lapsus, des oublis et autres actes manqués constituent, avec les 
symptômes psychopathologiques, ce 
retour du refoulé.
    
Illustration : Maslow : un ‘psy’ plein de sagesse …
Le problème de notre monde réside en ce que la civilisation a tendance à 
couper l’être de sa Nature, avec une ‘N’ majuscule. La conséquence en est que 
l’être en vient à ignorer ou nier son fondement lié à son propre maintien en 
vie. Le psychologue américain Abraham Maslow disait que :
     …
ce que chacun doit faire découle de ce 
qu’il est réellement, profondément, comme membre de l’espèce humaine et comme 
individu particulier. 
On retrouve là les qualités dont il a été question plus haut. 
Il poursuit en disant que … Toutes les 
époques ont eu leurs modèles, leurs idéaux, qui ont façonné notre culture … 
parmi eux, il cite le chevalier, le mystique, le héros … entre autres. Mais il 
ajoute ce terrible constat : 
… Nous avons abandonné tout cela au 
profit de l’homme bien adapté, l’homme sans problème. 
Ces extraits sont tirés de A. Maslow, 
Vers une psychologie de l’être, chapitre 1 :
Pour une psychologie de la santé.
Non-violence
Prendre la décision d’observer la règle de la non-violence (Ahimsa) signifie 
se connaître suffisamment et bien, avoir identifié sa propre violence car la 
nier ne l’empêche pas d’être, comme le laisse comprendre le mécanisme 
psychologique évoqué plus haut du retour du refoulé. S’engager sur la 
voie de la spiritualité ne diminue pas les tendances et pulsions humaines 
naturelles que l’on doit d’abord apprendre à connaître en contrôler avant 
d’avancer encore sur cette voie si on ne veut pas faire de faux pas.
Les principes du Yoga nous y amènent : 
Brahmacharya ou contrôle des sens 
aussi bien en pensée, en mots et en 
actions et Swadhyaya,
l’étude de soi sont deux éléments des 
premières étapes du Yoga traditionnel à intégrer à sa vie et à sa démarche. Il 
importe donc de faire connaissance avec ce fond de violence commun à toutes les 
espèces vivantes dont nous sommes une branche. C’est la seule condition si on 
souhaite vrai-ment maîtriser cette énergie qui, sans cela, reste incontrôlable 
et trouve son aboutissement dans la violence inutile, l’agressivité et/ou la 
haine s’exprimant sous des formes pas toujours franches, souvent perverses, 
toujours intolérables.
Etre un guerrier ne signifie pas entrer en conflit mais se préparer à 
s’opposer : on entend beaucoup ces temps-ci, parler des
indignés. Nous le sommes tous en ce 
sens que chacun de nous a son regard sur le monde actuel, qu’on l’exprime ou 
non. Passer de l’indignation à l’action, ne serait-ce que par le refus de ce qui 
semble une évidence dictée par le modernisme, c’est être un guerrier. Sinon, on 
reste prisonnier de ce que, dans la fable 
L'abbesse malade, Jean De La Fontaine nommait :
la moutonnière bande. Il y reprend 
l'histoire de Panurge :
     
Qu'un seul mouton se jette en la rivière,
     Vous ne verrez nulle âme moutonnière
     Rester au bord, tous se noieront à 
tas. 
    
Illustration : Une attitude répandue par Gandhi et bien 
d’autres encore
 La 
Fontaine connaissait bien les animaux et aussi et surtout les travers humains. 
Cette perception de ces aspect commun et courant chez l'humain, lui fait dire 
ensuite :
La 
Fontaine connaissait bien les animaux et aussi et surtout les travers humains. 
Cette perception de ces aspect commun et courant chez l'humain, lui fait dire 
ensuite : 
     
Brebis sont la plupart des personnes;
     Qu'il en passe une, il en passera 
cent, 
     Tant sur les gens est l'exemple 
puissant. 
     Je le répète, et dis, vaille que 
vaille,
     Le monde n'est que franche 
moutonnaille. 
Plus proche de nous, le chanteur Alain Souchon interprétait il y a quelques 
années, la chanson "C'est comme vous 
voulez", dans laquelle il entonnait … 
Où vous irez j'irai ! … tout en évoquant à plusieurs reprises le …
mouton suiveur … qu'est celui qu’il 
désigne comme … obéissant
p'tit boy qui a
suivi pour l'honneur … mais aussi …
pour l'horreur … et qui n'est, 
finalement, je cite, qu'un … mouton 
soumis, docile et sans rébellion … tout juste capable de dire : …
bêê, bêê, je suivrai la guerre ou la paix 
… 
    
Illustration : Panurge nous a beaucoup appris 
sur le comportement humain …
J’ai déjà traité cette question dans quelques numéros de la revue (Drish n° 
87-88 à 103). Nous avions vu que le Yoga traditionnel est une voie de refus de 
vivre comme le commun des mortels, une voie de conscience, une voie de 
réflexion, une voie de recherche d’idéal. Le yogi refuse de se laisser vivre et 
décide de prendre sa vie en main, de vivre en conscience et d’agir par lui-même.
La voie du Yoga
Contrairement à ce que l’on pense très souvent, le choix de la non-violence 
nécessite que l’on ait à sa disposition les moyens d’être fort pour pouvoir 
résister et violent : c’est la condition du choix réel du renoncement à la 
violence. On a les moyens d’être violent, mais on décide de prendre une autre 
voie, celle de la paix et de la recherche de l’entente et d’une confrontation 
juste et généreuse. 
Le Yogi-guerrier s’est donc confronté à sa propre violence, a fait connaissance 
avec ses peurs et ses capacités naturelles à faire mal, sa part animale et, loin 
de les nier ou de les anéantir, il a appris à connaître les conditions de leur 
venue et de leur expression ainsi que leur fonctionnement et peut ainsi 
envisager de bons et nobles combats comme ceux visant la défense des valeurs 
fondamentales qui constituent le fondement du Yoga traditionnel. 
Satyam, valeur du Yoga traditionnel 
liée à la vérité, à la droiture, nécessite de se voir tel que l’on est, 
dans toute sa réalité, aussi bien celle attrayante que celle moins sympathique, 
l’ombre dont parlait Jung. 
Brahmacharya déjà cité plus haut, le
contrôle des sens (il y a 11 sens) et de soi, nécessite le contrôle de la 
violence. Tapas, l’ascèse et
Swadhyaya, l’étude de soi déjà citée, 
font partie de ces valeurs premières du Yoga qui mènent inévitablement à cette 
attitude de débusquer cette violence première et vitale si délicate à contrôler.
Quelques modèles
On retrouve le même esprit dans le Bushido (de
Bushi, guerrier et
Do, voie en japonais) sur lequel je 
reviendrai. 
    
Illustration : Carl Gustav Jung
En parallèle et toujours en ce qui concerne les comportements humains sur 
l’étude desquels on ne peut faire l’impasse lorsqu’on cherche à s’améliorer, il 
faut remarque que le courageux n’est pas celui qui n’a pas peur, auquel cas il 
ne serait qu’une ‘tête brûlée’ mais celui qui la vit et parvient à la maîtriser 
pour qu’elle ne gêne pas l’action qu’il a décidé d’accomplir.
Afin de bien comprendre ce que peut être ce Yogi-guerrier, rien ne vaut une 
bonne illustration, même si le modèle proposé n’est pas un pratiquant de Yoga.
Il serait possible d’évoquer certains sages de l’Inde dont certains se sont 
comportés comme de vrais guerriers, au risque de surprendre le lecteur. 
Vivekananda dans son énorme travail sur lui-même et son immense œuvre laissée à 
sa mort à tout juste 40 ans, Shivananda et sa résistance aux bien-pensants qui 
lui reprochaient de mettre le Yoga traditionnel à la disposition des 
Occidentaux, Rabindranath Tagore et son action pour le peuple, Gandhi et son 
engagement auprès des plus défavorisés. Mais Gandhi était-il un sage ? Ce fut 
une discussion que j’eus avec une de mes formatrices en 1984 ou 1985 (… ça 
commence à être loin ! …) : son argument essentiel était le nombre de morts 
générés par la partition de l’Inde et du Pakistan suite à l’indépendance de 
l’Inde due au Mahatma qui disait clairement et tout haut aux Britanniques : 
Quit India ! … Je crois que ces mots se passent de traduction.
Et puis, j’ai pu tout au long des quelques 4.000 pages de Drish, évoquer 
certaines personnalités. J’en retiendrai quelques unes qui serviront 
d’illustrations et de modèles dans mon explication et ma démonstration. Je 
commencerai par Henri Laborit, celui-là même qui a traité de la violence et de 
l’agressivité et qui a décrit, à la suite des travaux de Mac Lean, la triple 
structure cérébrale directement issue de l’évolution de la vie depuis l’ère 
reptilienne jusqu’aux hominidés.
La suite est dans les pages suivantes sous le titre : Un délinquant qui ne 
s’est jamais fait prendre … selon sa propre expression choisie pour se 
définir lui-même.
Bonne lecture
Sommes-nous des yogis-guerriers ?  -  Drish 119
Je crois pouvoir affirmer que ce que chaque être humain recherche, au-delà de la 
satisfaction de ses besoins premiers, est, sinon le bonheur, en tout cas d’être 
heureux. Ceci n’est accessible que si l’on a la possibilité de vivre une vie 
paisible … Comme le dit très justement la Bhagavad Gîtâ II, 66 à propos de la 
méditation (Cf page 4) : 
     "… 
sans paix, il n'y a pas de bonheur."
Le problème se pose lorsque l’environnement humain en décide autrement et 
pour diverses raisons pas toujours raisonnables, adopte des attitudes ou commet 
des actes contraires aux valeurs communes à de nombreux codes humains, 
spirituels, philosophiques, religieux, humanistes.
Les principes garantissant l’existence paisible dans la communauté humaine, se 
transmettent. Par l’éducation, d’abord, puis par le contact aux autres dans le 
monde scolaire. Les valeurs enseignées au 
catéchisme, sont celles de tolérance, de sagesse, de respect, d'éthique, 
d'humanisme et bien sûr de spiritualité, ce qui se poursuit parfois dans les 
familles croyantes et pratiquantes. 
Ces valeurs de morale se retrouvent 
dans ce que l’on nommait à une époque, l’Instruction civique. En 2013, on évoque 
la morale laïque. 
L'écrivain péruvien Mario Vargas Llosa 
préconisait 
: 
     "… 
une société démocratique ne peut combattre efficacement ses propres ennemis … si 
ses institutions ne sont pas solidement fondées sur des valeurs éthiques, si en 
son sein ne se développe pas une riche culture spirituelle comme antidote aux 
forces destructrices, fracturantes et anarchiques qui sont seulement déterminées 
par les conduites individuelles libérées de toute responsabilité …
Peut-on ne pas agir ?
La maîtrise de soi et le respect de valeurs élémentaires sont des composantes de 
l'ascèse qui est une dimension fondamentale de toutes démarches spirituelles et 
initiatiques. L’erreur d’une intégration du Yoga et de la spiritualité dans nos 
vies d’Occidentaux serait de penser ou de croire que ces choix de démarches nous 
mettent à l’abri d’actions à mener ou d’engagements à prendre. Ce serait là la 
marque de l’indifférence aux conséquences inévitables car, si l’on ne peut pas 
ne pas agir, ne rien faire signifierait cautionner les situations inadmissibles 
et se rendre complice responsable d’exactions commises sous nos sens. 
Il s’agit là d’un contresens parfois rencontré dans le monde du Yoga en Occident 
où la vision fantasmagorique du sage assis dispensant ses enseignements hors de 
tout conflit en ce monde, imprègne celui qui préfère se mettre à l’abri et 
laisser les autres agir à sa place. La Bhagavag-Gîtâ elle-même évoquait cette 
impossibilité de ne pas agir car l’action est inévitable (III, 5 à 7) : 
Car personne, pas même un instant, n’est 
réellement inactif ; tout homme, malgré lui-même, est mis en action par les 
fonctions naturelles de son être … Celui qui, après avoir enchaîné l’activité de 
ses organes, se tient inerte, l’esprit occupé des objets sensibles et la pensée 
errante, on l’appelle faux-dévôt … Mais celui qui, par l’esprit, a dompté les 
sens et qui met à l’œuvre l’activité de ses organes pour accomplir une action, 
tout en restant détaché, on l’estime, Arjuna.
  
    
Illustrations : 
                
-
Agir est un devoir 
               
- Les mythes hindous s’appuient sur ces images-symboles 
                - 
Des pratiques très puissantes 
                - 
Baïthak, technique de la caste guerrière
Résistance et non-violence
La vie quotidienne occidentale nous donne de nombreuses occasions de prendre 
position de façon ferme et engagée. La confusion ci-dessus vient de ce que l’on 
pense parfois que la non-violence (traduction la plus courante du premier 
principe du Yoga, Ahimsa) exige de ne 
pas s’opposer, de ne pas contrer, donc, de laisser faire … Pourtant le mot 
lui-même de Non-violence exprime bien ce qu’il signifie : dans sa composition 
même, il veut dire qu’il y a un choix autre que celui de la violence. Deux 
citations récemment présentées dans Drish vont dans ce sens : le philosophe 
français Jean-Marie Muller qui a consacré sa vie et son œuvre à la non-violence 
disait : 
       "Le 
désobéisseur est un dissident, il n'est pas un délinquant. Il ne se désolidarise 
pas de la collectivité politique à laquelle il appartient : Il ne refuse pas 
d'être solidaire, il refuse d'être complice."
Quant à Michel Coquet, il écrivait dans son livre
Kailash qui est le nom de la montagne 
sacrée sur laquelle demeure Mahayogi, le grand Yogi, Shiva : 
       "… 
L'authentique chercheur combine harmonieusement force physique et dynamisme 
spirituel." 
On pourrait bien se demander pourquoi la force physique … Au-delà de 
ce qui est dit dans la série d’articles sur le Yoga au quotidien (Papy 
s’entraine tous les jours), choisir de s’engager sur une voie ascétique et 
opter pour la non-violence signifie que l’on doit veiller au respect des 
principes et valeurs humanistes qui pourraient être menacés et aussi qu’il peut 
être demandé un engagement physique. L’autre raison est que le maintien de la 
force physique, de la capacité à s’opposer physiquement, sans toutefois 
rechercher cette ultime solution, renforce le mental et permet d’œuvrer plus 
aisément en ce monde pour le respect des principes évoqués. 
Enfin, dans Non-violence, il y a le 
mot violence : cela veut dire que 
celui qui choisit cette voie a les moyens d’être violent, mais, il fait le choix 
de ne pas user de ces moyens à sa disposition. Il s’agit là d’une notion très 
importante, car, en effet, être non-violent ne veut pas dire que l’on fasse ce 
choix par impossibilité d’user de moyens violents. 
Etre non-violent ne veut surtout pas dire être lâche, indifférent, inactif, 
découragé ou faible. 
Une obligation d’action
J’irai même plus loin : le fait de suivre la voie du Yoga, comme toute voie 
initiatique et spirituelle amenant à renoncer à sa ‘vieille vie’ pour renaître à 
une vie plus juste et fidèle à des valeurs que l’on tente alors de mettre en 
œuvre au quotidien tout en pratiquant une sorte d’exemplarité qui fait bien plus 
que les discours, tout en rendant la vie bien plus supportable, nous donne les 
outils d’amélioration de nous-mêmes et aussi de ce monde. 
Ce travail se fait à échelle humaine : c’est autour de soi que se répand ce 
nouveau parfum lié à une existence nouvellement fondée sur la conscience de son 
caractère précieux. Montaigne disait :
       "Si 
la vie n’est qu’un passage, sur ce passage, au moins, semons des fleurs"
Les nôtres permettront à ceux qui nous entourent de mesurer à quel point la 
beauté qui accompagne forcément les valeurs de la voie suivie, est possible, et 
de plus, qu’il suffit de choisir de s’y engager. 
On remarquera que c’est le premier pas qui est le plus difficile : une fois que 
l’action est entamée, il n’y a plus qu’à entretenir le mouvement, dans la même 
logique de ce que disait André Van Lysebeth dans la phrase que j’ai citée dans 
le dernier numéro, sur le plus dur dans le Yoga, qui est de dérouler son tapis.
Le choix de vivre conformément aux principes choisis permet de respecter le
Carpe diem des anciens Romains, de 
profiter de l’instant, non en le gaspillant, mais en en usant pour son bien et 
celui des autres. De plus, ce choix embellit la vie et la rend plus douce, ce 
qui va dans le sens de ce que disait le poète tragique grec Euripide au Vème 
siècle avant notre ère :
       "Une 
vie sans beauté est un bien lourd fardeau"
Encore la discipline
On pourra noter que le mot est plus effrayant que ce qu’il représente 
réellement lorsqu’on s’y met. Il faut être un yogi-guerrier, défenseur des 
principes du Yoga traditionnel, de façon paisible et ferme à la fois, dans un 
esprit non belliqueux mais déterminé. 
La violence qu’il ne faut pas confondre avec haine ou agressivité, tant 
vis-à-vis des autres que vis à vis de soi, est présente dans le Yoga. En effet, 
le Yoga n’est pas mou ni indolent comme peuvent le penser ceux qui se fient aux 
images de laisser aller que les médias affichent parfois.
Le mot Hatha Yoga se traduit par
Yoga de l’effort violent. Ce qu’il y 
a de violent dans la pratique physique et mentale est dans la tentative 
régulière de soumettre en douceur (!) sa propre nature à sa propre volonté.
Effort violent mesuré
Concrètement, les techniques de Yoga font agir le corps jusqu’à son maximum, 
toujours en le respectant : d’où l’intégration de techniques martiales dans le 
Yoga. La salutation au soleil et ses variantes ne sont pas inscrites dans les 
textes classiques du Yoga et ont été adoptées par les yogis hindous il y a 
quelques siècles seulement. 
Il en est de même pour le mouvement Baithak pratiqué par certains yogis hindous 
et classée parmi les Indian wrestling 
practices ou pratiques de lutte indienne. 
Baithak est aussi nommée Hindu squat 
(le squat est un mouvement de flexion sur les membres inférieurs) ou encore
Uthak bethak qui veut dire, en langue 
hindie : s’accroupir et se redresser.
Le premier travail sur soi, il est important de le redire n’est pas contre soi 
mais avec soi. On ne doit pas s’opposer à soi-même, car le risque serait le 
refoulement aux conséquences désastreuses. 
Il s’agit de travailler sur soi en se respectant et sans violence. 
De même que la sagesse populaire dit : 
     "… Chassez le 
naturel, il revient au galop … "
Dans le même sens, Francis Bacon disait avec justesse :
     "… On ne vainc 
la nature qu’en lui obéissant."
On retrouve ici aussi, au-delà de son propre tapis de Yoga, le principe de 
stihrasukham, qui caractérise la posture du Yoga, ferme (stihra) 
et agréable (sukham). 
On doit donc apprendre à connaître son corps, ce qui est conforme à l’esprit de
swadhyaya, l’étude de soi, pour mieux 
l’aborder et le mettre en action tout en le respectant.
L’Inde à l’origine du Kung Fu ?!
Les épopées indiennes racontent des conflits à ne pas considérer seulement 
au premier degré. Ils sont l’occasion pour chacun d’aller au fond de lui-même et 
de développer ce qu’il a de meilleur face aux situations difficiles pour le 
corps comme pour le mental des personnages en présence. 
D’autre part, la présence des arts martiaux en Inde est attestée de longue 
date : l’histoire montre que les origines du Kung Fu sont dans les disciplines 
transmises par Boddhidharma, prince indien qui s’en alla à Shaolin, au VIème 
siècle de notre ère …
                                                                                                                                                                                                  
 
(… À suivre …)
Sommes-nous des Yogis-guerriers ?
   -   Drish 121
Il est bien entendu que le mot guerrier n'est pas utilisé au sens où on 
l'entend habituellement, mais qu’il sert à désigner une fonction faisant partie 
de l'humain, soit pour maintenir la vie, ce qui heureusement est peu fréquent 
dans nos contrées, soit pour s'opposer ou résister, ce qui est, par contre, plus 
courant. En effet, notre monde actuel est riche en occasions de prendre position 
de façon quasi quotidienne. 
Un combat difficile
Mais un autre combat, qui n'est pas une guerre, est à mener, il s'agit de 
celui, nécessaire, contre certaines tendances naturelles simplement humaines, 
qui sont propres à l'ensemble de notre espèce.
Les traditions philosophiques et religieuses désignent ce nécessaire travail 
dans le sens de ce que l'on nomme traditionnellement la ‘vertu’ dont on notera 
au passage, l'étymologie ‘virile’ : 
virtus, en latin, est dérivé de ‘vir’ 
d'où viennent les mots viril et
virilité, qui signifie l'individu de 
sexe masculin. Virtus désigne la 
force virile, à partir de là, la valeur, ou encore la discipline. Il est 
intéressant de remarquer qu'en langue sanskrite, la vieille langue de l'Inde, le 
mot ‘vira’ signifie héros, homme au 
sens de mâle, chef.
     Illustration : 
अस्मिता
Asmita, l’ego
Comme indiqué ci-dessus, les voies spirituelles et initiatiques, prévoient la 
mise en place d'une pratique faite de discipline et d'ascèse dont le but est la 
maîtrise de l'être. Il ne s'agit pas ici, de s'imposer ou d'imposer aux autres, 
des exercices contraires aux valeurs fondamentales d'un humanisme qui ne vise 
que le développement de l'être dans toutes ses dimensions comme peut le proposer 
le Yoga considéré dans son intégralité traditionnelle. 
La culture qui est la nôtre, celle judéo-chrétienne, prône l'observance de 
certains principes et valeurs fondamentales dans le but d'une évolution vers une 
dimension spirituelle plus élevée. Le yoga en préconise un certain nombre qui 
sont identiques : ne pas nuire, véracité, simplicité, pureté, sympathie … 
     Illustration : 
Posture du guerrier
La religion musulmane a instauré le Jihad 
qui compte trois formes qu’il importe de bien définir selon la tradition afin de 
bien comprendre ce que chacune d’elles recouvre comme sens et comme attitude. 
Chacune d'elles a une fonction bien précise : la principale, nommée Djihad 
majeur, ou grand Jihad, est la lutte intérieure menée, l'effort que doit faire 
tout musulman pour lutter contre lui-même, son égoïsme, ses instincts, son 
orgueil, son envie de dominer les autres. La guerre sainte ne constitue que le 
Djihad mineur interne : il s'agit d’une guerre défensive, lorsque l'Islam est 
menacé de disparition. Le Djihad mineur externe a pour but de lutter contre les 
forces d'occupation ou de commettre des actes de terrorisme, dont les médias 
parlent souvent.
     Illustration : 
Arts martiaux d'Asie
Le plus grand ennemi
Chez les Amérindiens, le Chef Dan George rendait hommage au Grand Esprit …
dont le souffle donne vie au monde entier 
… et lui demandait force et sagesse. Après avoir formulé plusieurs vœux de 
marcher dans la beauté, de contempler les 
couchers de soleil rouges et empourprés, d'être capable toujours, de 
respecter les choses que le Grand Esprit a faites, d'entendre sa voix, de 
comprendre ce qu'Il a enseigné à son peuple, entre autres 
les leçons … cachées dans chaque feuille et chaque pierre, le chef Dan 
George formulait une requête singulière :
Je cherche la force, Créateur Unique, non 
pas pour être supérieur à mes frères, mais pour combattre mon plus grand ennemi, 
moi-même …
On voit bien, dans cette phrase, la nécessité de rester un guerrier.
Je reviens un instant sur cette idée de combattre, ce qui m'amène à vous 
proposer un petit tour dans le domaine du sens des mots.
Selon Bernard Wirz, spécialiste des lettres,
combattre vient de
combattere (vers 1080 après 
Jésus-Christ) : et du bas latin 
combattuere signifiant ‘se battre 
avec’. 
Le terme ‘battre’ avait un sens 
noble. On battait le blé, on battait monnaie aussi, ce qui donnait au métal 
précieux, une image particulière d'un personnage ou d'un symbole. Le préfixe
cum qui veut dire
avec, à toujours un sens positif 
d'harmonisation et d'équilibre, d'union comme dans les mots
compagnon,
compréhension,
consensus … Il importe, à partir de 
cette étymologie, de comprendre (sic) qu’il ne s'agit pas d'un conflit, mais 
d'un travail sur soi.
Histoire d’un mot
Il est intéressant de noter à quel point les habitudes, les médias, 
utilisation des mots, les déformations sémantiques, l'usage vulgarisé de 
certaines expressions, des formes de sens réel de certains termes au point qu'il 
est parfois difficile de revenir au sens premier. Ainsi, tout le monde connaît 
le kung-fu, qui fit son apparition sur le grand écran, à partir des années 70, 
et qui émerveilla, voire fascina un public à la fois surpris et envieux de 
telles prouesses dans l'art du combat.
C’est vrai, le kung-fu, dans une de ses dimensions, est un art martial. Mais ce 
n'est pas tout : son premier sens, c'est l'accomplissement de l'homme dans une 
discipline, quelle qu'elle soit. Le 
kung-fu, c’est se réaliser par son travail.
Cette pratique vise à l'excellence sur deux plans : dans le fond que la forme, 
il doit être présente dans l'accomplissement de sa propre existence. C'est un 
idéal d'engagement qui est fondé sur un travail difficile car il demande des 
efforts importants visant à l'accomplissement ci-dessus nommé, la réalisation de 
l'être passant par la maîtrise d'un art ou d'une discipline.
     Illustration : 
Shivananda
Le mot gongfu qui est à l'origine de 
kung-fu, est la 
maîtrise, le niveau : ainsi, un maître possédant la maîtrise de sa matière, que 
ce soit en mathématiques, en philosophie, en calligraphie, sera désigné comme 
ayant un bon kung-fu en 
mathématiques, philosophie, etc. 
Le nom réel de cette voie en tant qu’art martial, est le
kung-fu wushu, la dernière partie de 
l'expression, wushu, désignant la 
maîtrise de l'art martial.
Apparences et réalité
On le voit, la pratique martiale est bien plus que l’apparence que nous 
croyons parfois : elle est à considérer comme une vraie voie de réalisation de 
soi en même temps que le moyen de cultiver, physiquement, mentalement et 
spirituellement, les moyens de résister, de s’opposer. J’espère que le mot
spirituellement ne vous semble pas 
mal placé ici : nous avons vu, plus haut, le difficile combat à mener contre ses 
passions et sa nature ‘animale’. Dans notre culture judéo chrétienne, nous ne 
devons pas oublier que le héros des Evangiles n’était pas prêt à tout accepter 
et qu’il a exprimé ses désapprobations. Dans le verset 34 du chapitre X de 
l’Evangile de Mathieu, on trouve cette étonnante dans la bouche de Jésus : 
     
… Ne pensez 
pas que je sois venu apporter la paix sur la terre;
je suis venu apporter, non la paix, 
mais le glaive…
Cette parole est d'autant surprenante, on trouve dans le même 
Évangile, chapitre XXVI, verser 52, la phrase suivante :
… Remets ton épée à sa place, car tous 
ceux qui prendront l'épée périront par l'épée…
Nous pourrions voir là, une opposition de sens, voire une confusion. L'épée 
évoquée en premier, a une valeur symbolique, et la seconde une valeur réelle. 
Dans le premier sens, il s'agit de l'épée nécessaire à la défense de ses propres 
convictions, dans le domaine de l'élévation spirituelle. Cette phrase est à 
resituer dans son contexte d'il y a 2000 ans, lors de la naissance et de 
l'expansion du christianisme.
Tolérance
Sans avoir à revivre ce qu'ont vécu les premiers porteurs de messages d'une 
spiritualité quelle qu'elle soit, notre monde occidental étant plutôt porté vers 
la tolérance des idées, la laïcité permettant, logiquement, que chacun puisse 
vivre selon ses idées et ses choix spirituels, dans la mesure où ils ne gênent 
pas les autres, tout ceci permet de reconsidérer ce combat à mener pour défendre 
ses propres avis. C'est pourquoi l'idée non-violente exprimée dans la seconde 
phrase est plus adaptée. Il n'en reste pas moins que la tolérance évoquée ne 
garantit pas que est toujours l'écoute à laquelle on pourrait s'attendre dans un 
monde dit « civilisé ».
     Illustration : 
Voltaire
La grande chance de l'Inde se trouve dans son esprit d'ouverture totale qui 
admet toutes les idées dès l'instant où elles n'imposent rien à celles et ceux 
qui les ont pas adoptées. Les sages de l'Inde que nous étudions régulièrement 
lors des séminaires de yoga, n'ont jamais eu de détracteurs importants… À part 
peut-être, Shivananda qui, désirant transmettre à l'Occident les connaissances 
indiennes, dut subir quelques pressions de la part de ceux souhaitant conserver 
un certain pouvoir.
Le seul moment où l'Inde dut dégainer son épée concrètement, ce fut lorsqu'elle 
subit les invasions importantes avec des tentatives de soumission et de 
conversion forcée par les envahisseurs.
Résister
Sur de longues périodes s'étalant sur plusieurs siècles, les Hindous eurent 
à subir des pressions phénoménales et à faire face à des menaces de mort s'ils 
ne se convertissaient pas. Le problème du conflit est double : d'abord celui qui 
le cherche n'a pas envie d'une situation de paix, et, second point, celui qui le 
subit n'a que deux choix : résister ou bien se soumettre. Cette dernière 
solution n'est pas celle qu'on attend de l'être humain considéré dans sa dignité 
d'êtres humains. L'épée symbolique évoquée plus haut, amène à considérer qu'il 
peut y avoir de multiples façons de résister et de faire entendre sa raison et 
ses raisons. On n'a pas toujours à faire à des gens comme Voltaire disant :
     
Je ne suis pas d'accord avec ce que vous dites, mais je me battrai jusqu'au bout 
pour que vous puissiez le dire 
Il est donc nécessaire, toujours dans l'esprit de
Ahimsa, la non-violence, qui est un 
moteur du Yoga et de nombre de voies spirituelles et religieuses, de se préparer 
à affronter si on ne désire pas se voir imposer l’inacceptable.
     Illustration : 
Un sage hors du commun
La locution latine Si vis pacem, para bellum 
… 
qui signifie : 
Si tu veux la paix, prépare la guerre ! … 
correspond à ce que l'on nomme quelquefois la
paix armée. L'association de ces deux 
mots semble surprenante : la jonction de la branche de chêne du rameau 
d'olivier, figure cette manière de considérer les choses sous un angle plus 
courant lorsqu'on aborde le monde du Yoga. Parvenir à la paix par le biais la 
force est parfois une nécessité : un des fondements de la non-violence et qu'il 
vaut mieux une petite violence qui empêche une grande, plutôt que laisser les 
choses évoluer dans le mauvais sens.
Cette drôle d'association des mots paix 
armée, peut surprendre aussi bien les adeptes de la paix que ceux qui 
considèrent qu'elle est impossible. L'acquisition des principes de l'art du 
combat, doit s'accompagner d'une élévation spirituelle particulièrement 
importante. Cette idée plairait à Rabelais qui exprimait que :
     
Science sans conscience n'est que ruine de l'âmeChacun 
de nous pourrait citer des exemples et anecdotes de sa vie permettant 
d'illustrer les moments au cours desquels il ou elle a dû s'armer mentalement au 
moins, verbalement sûrement, peut-être même dans l'action, enfin de faire valoir 
ou reconquérir ses droits et sa dignité. 
     Illustration : 
Le kyudo
Un vieux dicton occitan enseigne que : 
‘Al que se fa oelha, lo lop lo manja’ … ce qui signifie :
à qui se fait brebis, le loup la mange. 
Un article paru récemment dans un quotidien rappelait que dans l’histoire de 
France, l’agneau de Toulouse (le blason de la ville),
l'agneau 
nimbé, portant la Croix de Toulouse en bannière, a eu affaire au loup 
qu’était Simon de Montfort.
L'agneau qui serait le signe premier de la ville et 
remonterait à l'époque romaine, symbolise la force. Selon Nicolas Berey (1663), 
la symbolique de l'animal s'expliquerait par le culte rendu à Jupiter, révéré 
sous la forme du bélier. 
Nous verrons dans le prochain numéro à quel point le yoga, la méditation, des 
arts martiaux possèdent de nombreux points communs.
                     
                                           
                                    
(… À suivre …)
Sommes-nous 
des Yogis-guerriers ? 
-  Drish 122-123
Je crois pouvoir affirmer que ce que chaque être humain recherche, au-delà de la 
satisfaction de ses besoins premiers, est, sinon le bonheur, en tout cas d’être 
heureux. Ceci n’est accessible que si l’on a la possibilité de vivre une vie 
paisible … Comme le dit très justement la Bhagavad Gîtâ II, 66 à propos de la 
méditation (Cf page 4) : 
     "… 
sans paix, il n'y a pas de bonheur."
Le problème se pose lorsque l’environnement humain en décide autrement et 
pour diverses raisons pas toujours raisonnables, adopte des attitudes ou commet 
des actes contraires aux valeurs communes à de nombreux codes humains, 
spirituels, philosophiques, religieux, humanistes.
Les principes garantissant l’existence paisible dans la communauté humaine, se 
transmettent. Par l’éducation, d’abord, puis par le contact aux autres dans le 
monde scolaire. Les valeurs enseignées au 
catéchisme, sont celles de tolérance, de sagesse, de respect, d'éthique, 
d'humanisme et bien sûr de spiritualité, ce qui se poursuit parfois dans les 
familles croyantes et pratiquantes. 
Ces valeurs de morale se retrouvent 
dans ce que l’on nommait à une époque, l’Instruction civique. En 2013, on évoque 
la morale laïque. 
L'écrivain péruvien Mario Vargas Llosa 
préconisait 
: 
     "… 
une société démocratique ne peut combattre efficacement ses propres ennemis … si 
ses institutions ne sont pas solidement fondées sur des valeurs éthiques, si en 
son sein ne se développe pas une riche culture spirituelle comme antidote aux 
forces destructrices, fracturantes et anarchiques qui sont seulement déterminées 
par les conduites individuelles libérées de toute responsabilité …
Peut-on ne pas agir ?
La maîtrise de soi et le respect de valeurs élémentaires sont des composantes de 
l'ascèse qui est une dimension fondamentale de toutes démarches spirituelles et 
initiatiques. L’erreur d’une intégration du Yoga et de la spiritualité dans nos 
vies d’Occidentaux serait de penser ou de croire que ces choix de démarches nous 
mettent à l’abri d’actions à mener ou d’engagements à prendre. Ce serait là la 
marque de l’indifférence aux conséquences inévitables car, si l’on ne peut pas 
ne pas agir, ne rien faire signifierait cautionner les situations inadmissibles 
et se rendre complice responsable d’exactions commises sous nos sens. 
Il s’agit là d’un contresens parfois rencontré dans le monde du Yoga en Occident 
où la vision fantasmagorique du sage assis dispensant ses enseignements hors de 
tout conflit en ce monde, imprègne celui qui préfère se mettre à l’abri et 
laisser les autres agir à sa place. La Bhagavag-Gîtâ elle-même évoquait cette 
impossibilité de ne pas agir car l’action est inévitable (III, 5 à 7) : 
Car personne, pas même un instant, n’est 
réellement inactif ; tout homme, malgré lui-même, est mis en action par les 
fonctions naturelles de son être … Celui qui, après avoir enchaîné l’activité de 
ses organes, se tient inerte, l’esprit occupé des objets sensibles et la pensée 
errante, on l’appelle faux-dévôt … Mais celui qui, par l’esprit, a dompté les 
sens et qui met à l’œuvre l’activité de ses organes pour accomplir une action, 
tout en restant détaché, on l’estime, Arjuna.
     
 
   
        
 
      
   
 
 
Agir est un devoir 
- Des pratiques très 
puissantes - 
Baïthak, technique de la caste guerrière
Résistance et non-violence
La vie quotidienne occidentale nous donne de nombreuses occasions de prendre 
position de façon ferme et engagée. La confusion ci-dessus vient de ce que l’on 
pense parfois que la non-violence (traduction la plus courante du premier 
principe du Yoga, Ahimsa) exige de ne 
pas s’opposer, de ne pas contrer, donc, de laisser faire … Pourtant le mot 
lui-même de Non-violence exprime bien ce qu’il signifie : dans sa composition 
même, il veut dire qu’il y a un choix autre que celui de la violence. Deux 
citations récemment présentées dans Drish vont dans ce sens : le philosophe 
français Jean-Marie Muller qui a consacré sa vie et son œuvre à la non-violence 
disait : 
       "Le 
désobéisseur est un dissident, il n'est pas un délinquant. Il ne se désolidarise 
pas de la collectivité politique à laquelle il appartient : Il ne refuse pas 
d'être solidaire, il refuse d'être complice."
Quant à Michel Coquet, il écrivait dans son livre
Kailash qui est le nom de la montagne 
sacrée sur laquelle demeure Mahayogi, le grand Yogi, Shiva : 
       "… 
L'authentique chercheur combine harmonieusement force physique et dynamisme 
spirituel." 
On pourrait bien se demander pourquoi la force physique … Au-delà de 
ce qui est dit dans la série d’articles sur le Yoga au quotidien (Papy 
s’entraine tous les jours), choisir de s’engager sur une voie ascétique et 
opter pour la non-violence signifie que l’on doit veiller au respect des 
principes et valeurs humanistes qui pourraient être menacés et aussi qu’il peut 
être demandé un engagement physique. L’autre raison est que le maintien de la 
force physique, de la capacité à s’opposer physiquement, sans toutefois 
rechercher cette ultime solution, renforce le mental et permet d’œuvrer plus 
aisément en ce monde pour le respect des principes évoqués. 
Enfin, dans Non-violence, il y a le 
mot violence : cela veut dire que 
celui qui choisit cette voie a les moyens d’être violent, mais, il fait le choix 
de ne pas user de ces moyens à sa disposition. Il s’agit là d’une notion très 
importante, car, en effet, être non-violent ne veut pas dire que l’on fasse ce 
choix par impossibilité d’user de moyens violents. 
Etre non-violent ne veut surtout pas dire être lâche, indifférent, inactif, 
découragé ou faible. 
Une obligation d’action
J’irai même plus loin : le fait de suivre la voie du Yoga, comme toute voie 
initiatique et spirituelle amenant à renoncer à sa ‘vieille vie’ pour renaître à 
une vie plus juste et fidèle à des valeurs que l’on tente alors de mettre en 
œuvre au quotidien tout en pratiquant une sorte d’exemplarité qui fait bien plus 
que les discours, tout en rendant la vie bien plus supportable, nous donne les 
outils d’amélioration de nous-mêmes et aussi de ce monde. 
Ce travail se fait à échelle humaine : c’est autour de soi que se répand ce 
nouveau parfum lié à une existence nouvellement fondée sur la conscience de son 
caractère précieux. Montaigne disait :
       "Si 
la vie n’est qu’un passage, sur ce passage, au moins, semons des fleurs"
Les nôtres permettront à ceux qui nous entourent de mesurer à quel point la 
beauté qui accompagne forcément les valeurs de la voie suivie, est possible, et 
de plus, qu’il suffit de choisir de s’y engager. 
On remarquera que c’est le premier pas qui est le plus difficile : une fois que 
l’action est entamée, il n’y a plus qu’à entretenir le mouvement, dans la même 
logique de ce que disait André Van Lysebeth dans la phrase que j’ai citée dans 
le dernier numéro, sur le plus dur dans le Yoga, qui est de dérouler son tapis.
Le choix de vivre conformément aux principes choisis permet de respecter le
Carpe diem des anciens Romains, de 
profiter de l’instant, non en le gaspillant, mais en en usant pour son bien et 
celui des autres. De plus, ce choix embellit la vie et la rend plus douce, ce 
qui va dans le sens de ce que disait le poète tragique grec Euripide au Vème 
siècle avant notre ère :
       "Une 
vie sans beauté est un bien lourd fardeau"
Encore la discipline
On pourra noter que le mot est plus effrayant que ce qu’il représente 
réellement lorsqu’on s’y met. Il faut être un yogi-guerrier, défenseur des 
principes du Yoga traditionnel, de façon paisible et ferme à la fois, dans un 
esprit non belliqueux mais déterminé. 
     Illustration : 
Les mythes hindous s’appuient sur ces 
images-symboles
La violence qu’il ne faut pas confondre avec haine ou agressivité, tant 
vis-à-vis des autres que vis à vis de soi, est présente dans le Yoga. En effet, 
le Yoga n’est pas mou ni indolent comme peuvent le penser ceux qui se fient aux 
images de laisser aller que les médias affichent parfois.
Le mot Hatha Yoga se traduit par
Yoga de l’effort violent. Ce qu’il y 
a de violent dans la pratique physique et mentale est dans la tentative 
régulière de soumettre en douceur (!) sa propre nature à sa propre volonté.
Effort violent mesuré
Concrètement, les techniques de Yoga font agir le corps jusqu’à son maximum, 
toujours en le respectant : d’où l’intégration de techniques martiales dans le 
Yoga. La salutation au soleil et ses variantes ne sont pas inscrites dans les 
textes classiques du Yoga et ont été adoptées par les yogis hindous il y a 
quelques siècles seulement. 
Il en est de même pour le mouvement Baithak pratiqué par certains yogis hindous 
et classée parmi les Indian wrestling 
practices ou pratiques de lutte indienne. 
Baithak est aussi nommée Hindu squat 
(le squat est un mouvement de flexion sur les membres inférieurs) ou encore
Uthak bethak qui veut dire, en langue 
hindie : s’accroupir et se redresser.
Le premier travail sur soi, il est important de le redire n’est pas contre soi 
mais avec soi. On ne doit pas s’opposer à soi-même, car le risque serait le 
refoulement aux conséquences désastreuses. 
Il s’agit de travailler sur soi en se respectant et sans violence. 
De même que la sagesse populaire dit : 
… Chassez le naturel, il revient au galop
… 
… dans le même sens, Francis Bacon disait avec justesse :
… On ne vainc la nature qu’en lui 
obéissant.
On retrouve ici aussi, au-delà de son propre tapis de Yoga, le principe de 
stihrasukham, qui caractérise la posture du Yoga, ferme (stihra) 
et agréable (sukham). 
On doit donc apprendre à connaître son corps, ce qui est conforme à l’esprit de
swadhyaya, l’étude de soi, pour mieux 
l’aborder et le mettre en action tout en le respectant.
L’Inde à l’origine du Kung Fu ?!
Les épopées indiennes racontent des conflits à ne pas considérer seulement 
au premier degré. Ils sont l’occasion pour chacun d’aller au fond de lui-même et 
de développer ce qu’il a de meilleur face aux situations difficiles pour le 
corps comme pour le mental des personnages en présence. 
D’autre part, la présence des arts martiaux en Inde est attestée de longue 
date : l’histoire montre que les origines du Kung Fu sont dans les disciplines 
transmises par Boddhidharma, prince indien qui s’en alla à Shaolin, au VIème 
siècle de notre ère …
                                                                                                              
       (… à 
suivre …) 
Sommes-nous 
des Yogis-guerriers ? 
-  Drish 126
...
Dans le numéro 
122-123, j’évoquais cette idée qui peut surprendre, que les Arts 
martiaux pourraient avoir leur origine au pays du Yoga. 
Bien sûr, le Mahâbhârata 
mentionné page 22 et le Râmâyana qui sont deux épopées particulièrement 
importantes dans la culture indienne et pour la compréhension de certaines 
données d’ordre philosophique, sont des récits dans lesquels la guerre est 
présente. 
Il ne s’agit ni plus ni moins que de la mise en place d’un drame 
cornélien qui permet, face à l’inéluctabilité de la destinée, d’aller à 
l’essentiel. Les conflits ne sont donc pas à prendre au premier degré, mais à 
voir comme le reflet de ce qui se passe en chacun de nous dans le courant d’une 
vie, selon les divers épisodes vécus.
L’Inde à l’origine du Kung Fu ?! 
Il existe autant de styles d’Arts martiaux ou de sports de défense qu’il y a de 
peuples : un coup de poing reste un coup de poing, idem pour un coup de pied, 
une épée ou un sabre. Au-delà de l’aspect martial, les Arts de combat méritent 
cette appellation d’˝Arts˝ en ce qu’ils sont portés par une philosophie et 
porteurs d’un message.
Certaines pratiques de Yoga ont été empruntées à la caste guerrière. Mais bien 
avant, le prince indien Boddhidharma s’en alla en Chine autour du VIème siècle 
de notre ère. Après une brève apparition auprès des gouvernants et suite à 
quelques péripéties qui ne peuvent que le rendre sympathique (nous y reviendrons 
au séminaire A de Juillet et dans la revue), il se rendit à Shaolin, lieu connu 
pour être le siège du Kung-Fu et rendu célèbre par certains films des années 70.
Après être resté très longtemps en méditation, il entra au monastère Shaolin et 
enseigna aux moines une
pratique martiale, thérapeutique et religieuse. Parmi les buts principaux 
étaient ceux de les rendre plus forts lors des attaques des brigands, fréquentes 
en ces périodes reculées, et plus ˝éveillés˝, ou moins somnolents, si vous 
préférez, lors des pratiques méditatives.   
De là sont nés deux styles : le style ˝externe˝, le Kung Fu Wu Shu, l’art 
du combat, et le Kung Fu ˝interne˝, nommé de nos jours Chi Kong dont certaines 
techniques vous sont parfois proposées lors de mes séances depuis très 
longtemps.  
    
L’Inde et ses arts martiaux     
On peut donc dire, en synthèse, que les techniques de Yoga chinois sont nées de 
la rencontre du Kalaripayatt, art 
martial indien enseigné par Boddhidharma, au VIème siècle de notre ère, et du 
bouddhisme dans le fameux creuset des temples de Shaolin. 
L’Inde a donné naissance à deux arts martiaux : le
Kalaripayatt, originaire du Kerala et 
le Varma Kalai né au Tamil Nadu, état 
voisin. On comprend mieux que les yogis hindous aient pu puiser avec facilité 
dans des techniques nées sur leur propre sol.    
Les origines des arts martiaux indiens remonteraient au IIème siècle avant notre 
ère : des écrits sur feuilles de palme auraient été trouvés datant de cette 
époque éloignée.     
Boddhidharma serait parti en Chine après avoir fondé une école de Kalaripayatt 
au Kerala.      
Guerre et paix     
Nous avons 
pu voir un peu plus haut, que ces arts constituent une 
pratique à la fois 
martiale 
et thérapeutique. En effet, les maîtres de ces disciplines sont à la fois 
guerriers et médecins, 
puisqu’ils connaissent les méthodes qui peuvent blesser ou tuer et aussi celles 
qui servent la vie en soignant les personnes. L’image ci-contre montre un 
écusson porté par des générations de pratiquants de Karate-do : le poing est au 
service de la paix.
Il est 
important de bien noter la différence entre les notions d'"Arts Martiaux" et de 
"Sports martiaux". L'essentiel n'est pas d'atteindre la personne en face, mais 
plutôt de lutter contre le véritable adversaire : soi-même, tout en faisant de 
l'affrontement, une rencontre, un échange.     
Bien qu'ayant évolué au 
point qu'on en oublie parfois le Do, la Voie ("Tao" en chinois, Dao en 
vietnamien) les Arts Martiaux ont toujours été couplés avec une pratique de 
Méditation et une visée spirituelle (Cf. les techniques bouddhistes, l'Art du 
tissage ancien, le rôle de la concentration dans l'exploitation du Chi, ou Ki, 
la relation étroite Aïkido-Shinto …).    
La pratique martiale nécessite une centration de l'être (matière et esprit, 
notion de verticalité), seule garante d'une réponse appropriée. C'est un regard 
sur la -vie (et sur la mort aussi), une philosophie, une manière 
d'être.     
Enfin, il faut se souvenir que la plus prisée des voies, le sommet des 
Arts martiaux est la "voie du non-sabre", en accord avec les plus hautes valeurs des 
samouraïs : la plus grande victoire est celle qui s’obtient sans user de 
violence. Cet esprit est conforme à l’enseignement du Yoga qui nous enjoint 
aussi d’agir en ce monde avec des moyens forts et pacifiques.
Un 
délinquant … qui ne s'est jamais fait prendre
  
-   Drish 115
 Etre 
un guerrier ne signifie pas user de violence : il est des combats menés avec 
douceur et ténacité. En divers lieux et moments,
la Lettre de l'Institut, la revue 
Drish, les stages et séminaires de Yoga, j’ai pu évoquer certains personnages, 
orientaux et occidentaux, qui se sont comportés comme des guerriers en ce qu’ils 
ont refusé de se laisser imposer des modes de fonctionnement, et su imposer 
leurs façons d’être et d’agir respectueuses de l’humain. Pour cela, je reviens 
sur ce personnage marquant de notre culture moderne, déjà évoqué (la 
Lettre de l'Institut n°7, Déc. 1999).
Etre 
un guerrier ne signifie pas user de violence : il est des combats menés avec 
douceur et ténacité. En divers lieux et moments,
la Lettre de l'Institut, la revue 
Drish, les stages et séminaires de Yoga, j’ai pu évoquer certains personnages, 
orientaux et occidentaux, qui se sont comportés comme des guerriers en ce qu’ils 
ont refusé de se laisser imposer des modes de fonctionnement, et su imposer 
leurs façons d’être et d’agir respectueuses de l’humain. Pour cela, je reviens 
sur ce personnage marquant de notre culture moderne, déjà évoqué (la 
Lettre de l'Institut n°7, Déc. 1999). 
Né en 1914, décédé le 18 Mai 1995, Henri Laborit voyait la mort comme quelque 
chose de "pas marrant" quand on 
apprécie la vie. Il est vrai que son projet était d’œuvrer pour le bien des 
autres : "Moi, j'aimerais bien continuer 
à travailler", disait-il, à condition de ne pas souffrir d’une maladie liée 
à une sénescence cérébrale. Le travail, il connaissait bien : il a été le 
premier dans les années 50 à pousser très loin les recherches sur le Système 
Nerveux et a mis au point l’hibernation artificielle, et de nombreuses 
découvertes sur l’anesthésie, les neuroleptiques et tranquillisants …
Ce neurobiologiste mondialement connu, souvent dédaigné en France, était aussi 
un spécialiste du comportement humain. Ses recherches lui avaient permis de 
découvrir que … le comportement influence 
et transforme complè-tement une molécule chimique introduite dans l'organisme 
d'un animal … Sa conclusion 
était qu’il n'y a pas besoin d'une molécule pour créer une inhibition : les 
conditions extérieures suffisent. Les simples rapports avec les gens créent 
cette inhibition et assurent de retrouver la même société, car l'être vivant est 
… une mémoire qui agit. 
A partir de ce constat, on devine que le fait, pour l'individu, de contrôler ou 
de ne pas contrôler l'environnement social va modifier tout son équilibre 
biologique et son équilibre cérébral : mémoire, réaction aux drogues, molécules, 
médicaments, etc.
"Je ne me suis jamais laissé enfermer"
Ses thèses sur l'agressivité ont fait le tour du monde, et depuis 1957 
où il obtint le rare Prix Lasker disant que s’il se sentait étranger à son pays, 
il ne se sentait pas étranger à l’étranger, d’autant, selon ses dires que ce 
prix a été obtenu sans aucune compromission ni aucun appui de quiconque. Il 
s'est vu remettre d’autres médailles et prix, autant de distinctions pour ses 
travaux.
Il se définissait comme … un délinquant qui ne s'est pas fait prendre … 
ayant fui dans la recherche pour trouver ce qu'il n'y avait pas dans la médecine 
hospitalière. D’où son livre : Eloge de 
la fuite. Voici ce qu’il disait :
     … Je ne me suis jamais laissé 
faire quand on a voulu m'enfermer dans un local, qu'il soit conceptuel ou 
spatial …
Très vite, il s’est rendu compte de la recherche de la dominance et 
l'établissement des hiérarchies dans tous les comportements, tant entre les 
humains, qu'entre les états. Selon lui, la femme qui tente depuis quelques 
années de se dégager de l'emprise de l'homme, en est une illustration. 
     …
Tout n'est que compétition, c'est à 
l'origine de tous les malheurs de l'espèce. Quand on ne peut fuir, on lutte …
Le problème que nous rencontrons dans notre monde moderne est que, si ni 
fuite ni lutte ne sont possibles, le 
Système inhibiteur de l'action est là pour bloquer l'action, et donc 
empêcher … la possibilité de contrôler 
l'environnement au mieux de ses intérêts … De là découlent toutes les 
pathologies psychosomatiques. II faut noter que si on n'est pas bien dans sa 
peau, ce ne sont pas les psychotropes qui feront que l'on se sentira bien mieux, 
puisque l'environnement ne changera pas et restera le même.
Henri Laborit faisait partie de ces personnalités comme bien d’autres moins 
connues ou pas connues du tout. 
Chacun de nous peut par ses choix et même le doit en fonction de sa propre 
nature, agir en ce monde de façon à ce que les valeurs les plus élevées 
triomphent de la tendance actuelle, celle dénoncée par Maslow, ou celle que 
connaissent encore trop de nos contemporains, de penser que l’individu seul ne 
peut rien faire. 
Le guerrier, notre guerrier, celui qui est en chacun de nous est capable aussi 
de décider par lui-même, de reprendre le cours de sa vie selon ses propres choix 
sans se laisser dicter des lignes de conduite par qui que ce soit.
Je reconnais que ce n’est pas facile … mais si exaltant ! Bon courage !